mercredi 31 mai 2017

Ne te fie à personne - Vincent Villeminot



Ne te fie à personne - Vincent Villeminot

Editeur : Casterman
Nombre de pages : 357

Résumé : [Tome 2 de la saga La Brigade de l’Ombre. Peut se lire indépendamment du premier.] Le type tressaillit en sentant le métal froid des menottes. « Capitaine Jobert... Brigade des goules. » Elle vit les épaules se raidir, il commença à trembler. « Tu comprends de quoi je te parle ? » « Je... Je... » Il se mit à pleurer, comme un môme. « C'est la première fois ? » demanda Diane. « J'ai... j'ai blessé quelqu'un ? » Elle éprouva soudain un profond sentiment de pitié et de colère mêlées. « Blessé ? si tu savais... Tu n'imagines même pas. »



Un grand merci aux éditions Casterman pour l’envoi de ce volume et à la plateforme Livraddict pour avoir rendu ce partenariat possible.

- Un petit extrait -

« Les fous sont parfois les êtres les plus lucides, les plus transparents aussi. Parce qu’il faut parfois pouvoir tirer les rideaux, mettre des vitres fumées entre soi et le monde, pour en supporter la vision, pour supporter qu’il nous regarde. Et ils ne le peuvent pas. Les fous. »

- Mon avis sur le livre -

Lorsque je ne lis pas de sagas, j’essaye autant que possible de varier mes lectures, de ne pas lire d’affilée deux romans du même genre. Mais puisque le hasard a voulu que je reçoive la même semaine deux livres en partenariats étant tous deux des thrillers jeunesse, j’ai donc fait deux incursions d’affilée dans ce genre que je connais finalement assez mal. Je tiens toutefois dès présent à nuancer la classification de ce second tome, qui peut se lire indépendamment du premier : comme souvent avec Villeminot, les genres s’entremêlent et se mélangent habillement, et même si on trouve effectivement des éléments tout droit sortis des thrillers et autres policiers, on croise également bien des traces de fantastique, et même quelques touches de romance disséminées ci et là, et bien d’autres choses encore …

A chaque attaque de goule, c’est la Brigade Markowicz, dite aussi « la Brigade des goules » ou tout simplement la Brigade pour les intimes, qui intervient. Son boulot ? Interpeller le « client » - et non pas le meurtrier -, lui annoncer la terrible nouvelle – « désolée monsieur, vous êtes une goule … enfin vous souffrez du syndrome IBLIS, vous venez de tuer quelqu’un sans le savoir, mais rassurez-vous, si vous vous rendez au zoo … heu pardon, au centre de rétention de Denfert avant chaque crise, vous ne risquez plus de blesser personne, bonne soirée monsieur et bien le bonjour chez vous » - et enfin assurer sa sécurité face à la haine de l’opinion publique. Alors, lorsque plusieurs goules sont sauvagement assassinées, pas question de laisser la Criminelle, lente et incompétente, s’occuper seule de l’enquête : le capitaine Jobert, nouvellement affectée à la Brigade, compte bien coffrer le meurtrier avant ses supérieurs. Mais la situation est bien plus complexe que prévue, et les secrets qu’elle découvre remettent en question tout ce qu’elle tenait pour acquis … A qui peut-elle se fier, hormis à elle-même ?

Premier point très positif : ce tome est véritablement indépendant du premier. Aussi, bien que n’ayant jamais lu le volume précédent, je n’ai ressenti aucune difficulté à me plonger dans l’histoire, à saisir le rôle de la Brigade, à comprendre les relations entre les personnages … Alors certes, je ne suis pas tout à fait certaine d’avoir saisi quels étaient les événements relatés dans le premier tome et lesquels relevaient juste du passé « non conté » des personnages, mais c’est justement la preuve qu’ils ne sont absolument pas indispensables l’un envers l’autre ! Je tiens à rassurer ceux qui hésitent à lire ce roman car ils n’ont pas lu le premier tome : oubliez toute inquiétude à ce sujet, vous ne serez absolument pas largués, bien au contraire !

Second point très positif : les personnages. On s’en doute bien, dans une telle Brigade, on rencontre de sacrés phénomènes ! Entre le commissaire Markowicz errant sans relâche dans L’Enfer de Dante et son Enfer personnel, le commandant Bosco et ses indispensables carnets, le lieutenant Jimi et ses exorcismes à l’encens, et bien sûr le capitaine Jobert et son passé aussi tumultueux que mystérieux, on ne doit pas s’y ennuyer ! Sans oublier les deux fils du commissaire, la jeune Fleur amoureuse d’un funambule et la petite Adelaïde persuadée au fond d’elle-même d’être folle. Tous ces personnages ont leur personnalité propre, une personnalité forte et complexe, un passé qui les poursuit, un futur qui les attend … Contrairement à d’autres personnages dans d’autres livres qui portent fièrement leur statut de personnages inventés par un auteur, ceux-là semblent tellement vrais, tellement réels, tellement humains qu’on oublie bien souvent qu’il ne s’agit que de personnages de fiction …

Troisième point très positif : la narration. Je crois que je ne me lasserai jamais de la plume de monsieur Villeminot, elle nous happe, elle nous transporte dans un monde parallèle au notre, elle nous fait retenir notre souffle, elle nous fait sourire, trembler, elle nous fait rêver, aussi. Je suis toujours stupéfaite par le rythme des phrases de monsieur Villeminot : pas de longues envolées lyriques ou de descriptions « littéraires ». Non : c’est vivant, c’est dynamique, c’est expressif. J’aime ces phrases parfois lapidaires mais toujours percutantes, qui vont directement au fond des choses sans passer par d’artificielles périphrases certes plus « jolies » mais tellement inutiles. Pour raconter une histoire, il n’est pas nécessaire d’en faire trop, et monsieur Villeminot l’a parfaitement compris. Il n’en fait ni trop ni pas assez, il a trouvé le juste milieu, le bon rythme, et le lecteur n’a plus qu’à se laisser porter par ces mots, ces phrases, pour entrer dans cette histoire trépignante et captivante.

Je vais arrêter là mon énumération de points positifs, même si je pourrais continuer longtemps comme cela, pour m’arrêter un peu sur les côtés plus « négatifs », ou tout du moins les éléments qui me chagrinent. Je pense qu’au final, ils convergent tous vers le même ressenti : cette impression de « trop peu ». Au final, j’ai presque le sentiment que monsieur Villeminot (oui, je vais continuer à l’appeler ainsi jusqu’à la fin de ma chronique) s’est retenu : le dénouement arrive presque trop facilement, trop rapidement. Il se passe énormément de choses, mais le lecteur n’a pas le temps de savourer les implications de chacun de ses événements que déjà tout est résolu et tout est fini. Je n’aurai absolument pas été contre une cinquantaine – si ce n’est une centaine – de pages supplémentaires : je suis clairement restée sur ma faim, je pense que chaque étape de l’enquête aurait mérité à être expédiée un peu moins hâtivement.

En bref, une excellente lecture qui n’est pas passée loin du coup de cœur. Des personnages atypiques, plus énigmatiques que véritablement attachants. Une intrigue qui mêle brillamment enquête policière et créatures fantastiques, qui tient le lecteur en haleine, qui captive et qui côtoie une histoire d’amour discrète et mignonne à souhait (parce que oui, je n’ai absolument rien contre une petite romance un peu « gnangnan » dans un roman policier, bien au contraire). Seulement, un dénouement bien trop rapide qui me laisse sur ma faim … quel dommage !

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