mercredi 3 janvier 2018

L'expérience Cendrillon - Sébastien Fritsch



L’expérience Cendrillon, Sébastien Fritsch

Editeur : Fin mars début avril
Nombre de pages : 362
Résumé : Fuir : Milica n’a pas d’alternative. Parce que son mari est mort, dans sa maison réduite en cendres. Parce qu’elle ne sait ni qui l’a rendue veuve ni qui pourrait lui venir en aide. Parce que dans chaque ville qu’elle traverse, d’un bout à l’autre de l’Europe, de nouvelles questions se lèvent et de nouveaux cadavres tombent. Alors, elle continue. Sans savoir si sa course la rapproche de la délivrance ou de sa propre fin.

Un grand merci à Sébastien Fritsch pour l’envoi de ce volume (et la petite dédicace) et à la plateforme SimPlement pour avoir rendu ce partenariat possible.

- Un petit extrait -

« Elle arriva en vue de la route. Malgré l’obscurité, elle distingua nettement la fin de la zone boisée. Elle ressentit un net soulagement - il lui serait plus facile de courir sur le bitume -, mais aussitôt une nouvelle crainte bien la saisir : les tueurs qui avaient assailli sa maison s’en éloigneraient obligatoirement en passant par ici ; tout en restant concentrée sur sa course, il lui faudrait se tenir continuellement en alerte pour ne pas se laisser surprendre.  »

- Mon avis sur le livre -

Jamais deux sans trois, dit le proverbe, et il a parfaitement raison : Sébastien Fritsch m’avait déjà offert deux merveilleuses lectures sortant complétement de ma zone de confort avec Albédo et Se retenir aux brindilles, et voici qu’il recommence avec L’expérience Cendrillon ! Dévoré en une après-midi, ce véritable page-turner m’a clairement fait comprendre que le thriller psychologique et moi, nous étions faits pour nous entendre. Sous ce titre mystérieux, dont le lecteur ne découvre la signification que très tardivement, se cache un roman palpitant, captivant, étourdissant, qui vous happe du début à la fin et ne vous laisse aucun répit. En ouvrant ce livre, préparez-vous à trembler au moindre craquement, à frissonner à la moindre inspiration, à frémir lorsque vient la nuit … Une fois plongé dans l’ambiance angoissante de ce récit, on peine à s’en détacher.

La fuite commence en pleine nuit, dans les bois qui entoure leur propriété, et elle n’est pas prête de prendre fin. Sans connaitre l’identité de ses poursuivants, sans savoir à qui elle peut se fier pour leur échapper, Milica ne sait qu’une seule chose : ils ont tué son mari, et cherchent à la tuer également. Soupçonnée de meurtre, la jeune femme ne peut compter que sur elle-même pour survivre, tandis que cette effrayante course-poursuite s’éternise. Parviendra-t-elle à semer ses mystérieux assaillants ? Finira-t-elle par comprendre comment les choses en sont arrivées là ? Pourra-t-elle, un jour, faire de nouveau confiance à quelqu’un … ou est-elle condamnée à se méfier du monde entier, même de ceux qu’elle aime plus que tout au monde ?

Il est très difficile de vous parler de ce roman sans risquer de vous en dévoiler trop. Car finalement, tout l’intérêt de ce récit, c’est de se laisser embarquer par son rythme endiablé, de se laisser surprendre par ses nombreux rebondissements et ses incroyables révélations. Pas moyen de s’ennuyer avec L’expérience Cendrillon : comme Milica, le lecteur est sans cesse sur le qui-vive, ne se demandant pas si quelque chose de terrible ou de surprenant va arriver, mais quand et quoi.  On s’attache finalement tellement rapidement à la jeune femme qu’on s’inquiète terriblement pour elle, comme si on finissait par fusionner avec elle. Ses peurs sont nos angoisses, ses doutes sont nos incertitudes. L’auteur ne se contente pas de malmener sa personnage principale, c’est avant tout son lecteur qu’il cherche à embrouiller, à troubler, à surprendre. Sans cesse, il nous oriente vers de fausses pistes, jusqu’à ce que nous soyons parfaitement incapables de prédire le prochain revirement de situation. Jusqu’à la toute dernière phrase, il nous mène en bateau. Du génie ! 

Comme souvent chez Sébastien Fritsch, le lecteur est amené à se poser des tas de questions, sur lui-même, sur le monde. Pour ma part, je me suis tout d’abord demandé si, à la place, de Milica, j’aurai réussi à survivre. On ne va pas se mentir, la jeune femme a su faire preuve d’un sang-froid incroyable, malgré quelques moments de panique ou de découragement, elle est toujours parvenue à prendre des décisions raisonnées, à faire des choix efficaces. Cette capacité à faire preuve d’un tel discernement en dépit de la fatigue, du surplus d’émotions et de la peur viscérale, d’où vient-elle ? Est-ce la preuve de la force de caractère de ce personnage de fiction ? Ou bien est-ce, tout simplement, une sorte de réminiscence de nos instincts les plus primaires, ce même instinct qui conduit l’antilope à mettre en place des stratégies pour échapper aux prédateurs en anticipant le mode de fonctionnement de ces derniers ? La question est ouverte, vous avez quatre heures.

Mais ce thriller pose une autre question, à mes yeux plus difficile encore : celle de la confiance. La confiance peut se définir comme la « croyance en la valeur morale d’une autre personne, qui fait que l'on est incapable d'imaginer de sa part tromperie ou trahison ». Milica est exhortée par son mari à ne faire confiance à personne … Mais peut-elle réellement avancer en se méfiant de tout le monde, en considérant tout individu comme potentiellement dangereux, hostile ? Milica, malgré toute son intelligence et sa détermination, est incapable de se débrouiller totalement seule : il lui faut avoir confiance, même inconsciemment, en celui qui a élaboré les plans de la ville qu’elle cherche à traverser, en l’ouvrier qui a participé à la construction du moteur, en l’agriculteur qui dose les pesticides pour ne pas empoisonner les fruits et légumes … Sans cela, Milica serait condamnée à tourner en rond, à faire du sur-place, à mourir de faim. Il semble donc impossible de s’en sortir sans confiance en autrui … mais jusqu’à quel point devons-nous, pouvons-nous offrir cette confiance ? Voilà tout le terrible paradoxe que met en évidence ce roman : la confiance est une arme à double-tranchant, elle est indispensable à la vie humaine, sociale, mais elle peut à tout moment se retourner contre nous. Car la confiance peut être aveuglée, et se transforme alors en une menace d’autant plus grande qu’elle est totalement insoupçonnable … et insoupçonnée.

En bref, un livre captivant et palpitant qui vous fera trembler, frémir, sursauter. Coups de théâtre et révélations viennent rythmer cet ouvrage impossible à lâcher une fois commencé. Une course-poursuite à l’enjeu vital et à l’origine méconnue, dont le dénouement surprendra même les plus aguerris du genre. Vous qui détestez les intrigues trop prévisibles, réjouissez-vous, ce roman est fait pour vous ! C’est de plus toujours un véritable régal que de retrouver la plume de Sébastien Fritsch, cette narration vivante et vibrante, ce style légèrement cinématographique qui stimule l’imagination pour que celle-ci en fasse un véritable film intérieur. Vous l’aurez compris, L’expérience Cendrillon a été un véritable coup de cœur qui me conforte dans ma décision d’ouvrir mes horizons littéraires !

Ce livre a été lu dans le cadre de la Coupe des 4 maisons
(plus d’explications sur cet article)

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